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Vie du contrat de travail
Départ du salarié - licenciements
Départ du salarié - démission
L'abandon de poste volontaire : Présomption de démission
Édité le 14 nov. 2023
Depuis la Loi du Marché du travail publiée au J.O. du 22 décembre 2022, tout le monde en parle :
Abandon de poste = démission
« Le salarié qui a abandonné volontairement son poste et ne reprend pas le travail après avoir été mis en demeure de justifier son absence et de reprendre son poste, par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge, dans le délai fixé par l'employeur, est présumé avoir démissionné à l'expiration de ce délai. »
Mais sans le décret d’application où en sommes-nous aujourd’hui ?
Quel était l’objectif du législateur
Pour les entreprises :
Limiter les perturbations liées au départ intempestif des salariés dans un marché du travail en tension.
Pour les salariés :
Exclure les salariés des règles d’indemnisation du chômage dès lors que l’abandon de poste est volontaire.
Avant la Loi du Marché du Travail
La démission ne se présumait jamais, la jurisprudence était constante sur ce sujet. La démission du salarié devait être clair et non équivoque, de préférence en faisant l’objet d’un écrit, courrier simple remis en main propre, mail ou courrier recommandé. La démission verbale représentait un risque pour l’employeur.
L’abandon de poste pouvait dans certaines circonstances être un arrangement entre salarié et employeur pour rompre la relation contractuelle sans aucune indemnité de départ.
Les salariés abandonnaient leur poste parce qu’ils savaient être mieux traités que les salariés démissionnaires.
Petit comparatif :
Démission |
Abandon de poste |
Préavis à effectuer |
Départ immédiat |
Sanction possible si non-respect du préavis |
Aucun risque de poursuite |
Pas d'indemnisation chômage |
Ouverture de droits au chômage |
L’attitude respectueuse du salarié démissionnaire vis-à-vis de son entreprise n’était donc pas avantageuse pour lui et pouvait fortement l’inciter à faire un abandon de poste.
Aujourd’hui, plus personne ne démissionne !
Selon la Loi du Marché du Travail
L’Article L1237-1-1 du Code du Travail a été modifié comme suit :
« Le salarié qui a abandonné volontairement son poste et ne reprend pas le travail après avoir été mis en demeure de justifier son absence et de reprendre son poste, par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge, dans le délai fixé par l'employeur, est présumé avoir démissionné à l'expiration de ce délai.
Le salarié qui conteste la rupture de son contrat de travail sur le fondement de cette présomption peut saisir le conseil de prud'hommes. L'affaire est directement portée devant le bureau de jugement, qui se prononce sur la nature de la rupture et les conséquences associées. Il statue au fond dans un délai d'un mois à compter de sa saisine.
Le délai prévu au premier alinéa ne peut être inférieur à un minimum fixé par décret en Conseil d'Etat. Ce décret détermine les modalités d'application du présent article. »
La procédure à suivre après la parution du décret
Même si dans la pratique, les employeurs avaient pris l’habitude d’écrire à un salarié absent depuis plus de 48 heures pour demander un justificatif, la Loi imposera désormais de faire une mise en demeure par courrier recommandé avec avis de réception de demande de justification d’absence sous un certain délai.
Sans le décret d’application fixant le délai de réponse, cette procédure ne peut pas s’appliquer pour le moment.
Nous vous conseillons de rester sur une simple demande de justificatif d’absence. (Voir notre modèle ci-dessous).
Nous devons impérativement savoir :
- Quel serait le point de départ du délai :
- 1ère présentation du recommandé
- Date d’envoi par l’employeur
- Date de réception par le salarié
- Et, si le salarié ne reçoit jamais le courrier, déménagement, refus du recommandé, etc…
Quel contenu dans ce courrier, faudra-t-il évoquer directement le risque de présomption de démissions et les conséquences pour le salarié ?
A quel moment, l’employeur devra effectuer cette mise en demeure après combien de jours d’absence ?
Si le salarié se manifeste durant le délai et justifie de son absence, quelles conséquences ?
Si le salarié se manifeste après le délai avec des justificatifs tout à fait recevables pour motiver son absence ?
A la fin du délai de réponse que devra faire l’employeur :
- Acter de la démission du salarié et le préavis, qu’en est-il ?
- Maintenir le salarié dans les effectifs sans aucune autre procédure
- Licencier le salarié pour faute grave, quelle sera alors l’interprétation de Pôle Emploi ?
A quel moment délivrer les documents de sortie des effectifs, à la fin du délai, en respectant la durée du préavis de démission ?
L’employeur pourra-t-il choisir un délai plus long, un délai plus court mais avec plusieurs courriers de mise en demeure
L’employeur pourra-t-il ne pas évoquer la présomption de démission pour pouvoir éventuellement prendre la décision de licencier ?
La présomption de démission reste au profit de l’employeur mais en cas de litige larvé avec le salarié pourra-t-il encore licencier pour faute grave dans le cas d’un abandon de poste ?
Attention aux abandons de poste « involontaires »
Absence du salarié justifiée par des circonstances particulières
- Le droit de retrait des salariés s’il a bien été notifié à l’employeur
- Le droit de grève
- Le non-retour d’arrêt maladie de plus de 60 jours pour absence de mise en œuvre de la visite médicale de reprise
- Etat de santé du salarié (hospitalisation d’urgence – dépression – autres motifs de santé rendant impossible l’information de l’employeur)
- Une modification unilatérale d’une clause substantielle du contrat de travail par l’employeur
- Et, toute autre situation aux torts de l’employeur
Des questions encore, à ce jour, sans réponse !
Ce que ne précise pas la Loi
En cas de contestation aux Prud’hommes de la présomption de démission :
- Comment le Tribunal des Prud’hommes va mettre en œuvre la procédure accélérée ? Le délai d’un mois va-t-il pouvoir être respecté ?
- Quels risques pour l’employeur en cas de renversement de situation ? Quel type de licenciement sera retenu ? Quelles conséquences financières : indemnité de départ, dommages et intérêts ?
- Quels justificatifs le salarié peut-il apporter et comment les conseillers Prud’hommaux analyseront les manquements éventuels de l’employeur ?
Les premières jurisprudences pour répondre à ces questions dans 4 à 6 ans au mieux !
Notre Conseil
Il est donc urgent d’attendre les précisions qui seront apportées par le décret d’application, si vous faites face aujourd’hui à un abandon de poste, nous pouvons vous conseiller sur des cas simples.
Appelez-nous au 05 86 88 01 24 car la situation ne doit pas rester sans réaction de votre part.
Mais l’avis d’un expert s’impose dès lors que les relations Salarié/Employeur sont conflictuels, le service juridique de votre Expert-comptable ou un avocat en droit du travail pourra vous aider à y voir plus clair et à ne pas prendre de risques financiers.